Au Sénégal, la variabilité spatio-temporelle des précipitations a profondément
bouleversé les systèmes agricoles traditionnels, avec des répercussions notables sur les
rendements agricoles et les revenus des agriculteurs. Les aléas climatiques rendent la
gestion des calendriers agricoles imprévisible, compliquant ainsi les cultures pluviales.
En réaction, les populations ont orienté leurs efforts vers l’exploitation des bas-fonds
afin de garantir leur sécurité alimentaire. Le déplacement des activités agricoles de
l’interfluve vers les bas-fonds, entamé à la fin des années 1970, témoigne de
l’adaptation spontanée des communautés locales face aux perturbations climatiques.
Cet article se penche sur le système d’exploitation des bas-fonds du bassin versant de
Senghor, en se basant sur des données climatiques et des enquêtes auprès des
agriculteurs de ces zones. Autrefois négligés, les bas-fonds sont désormais intégrés
dans un système agricole intensif et diversifié. Leur exploitation ne se limite plus à l’agriculture, mais permet aussi de générer des revenus complémentaires, malgré les
conflits d’usage et les contraintes liées à l’exploitation et à la commercialisation des
produits. Ainsi, les bas-fonds deviennent des espaces stratégiques dans la redéfinition
des approches de développement et dans le renforcement de la résilience aux chocs
climatiques. Néanmoins, l’intervention des « tuteurs de résilience » et des facteurs de
production, tels que l’accès au foncier, les investissements et la gestion de l’eau,
engendrent des inégalités de revenus entre les exploitants.
In Senegal, the spatio-temporal variability of rainfall has profoundly disrupted
traditional agricultural systems, with significant impacts on crop yields and farmers’
incomes. Climatic uncertainties make the management of agricultural calendars
unpredictable, thereby complicating rainfed farming practices. In response,
communities have shifted their focus to the exploitation of lowlands to ensure food
security. The relocation of agricultural activities from interfluves to lowlands, initiated
in the late 1970s, reflects the spontaneous adaptation of local communities to climatic
disruptions. This article examines the system of lowland exploitation in the Senghor
watershed, drawing on climatic data and surveys conducted among farmers in these
areas. Once overlooked, lowlands are now integrated into an intensive and diversified
agricultural system. Their use extends beyond agriculture, providing complementary
incomes despite conflicts over resource use and challenges related to exploitation and
product commercialization. Thus, lowlands have become strategic spaces for
redefining development approaches and strengthening resilience to climatic shocks.
However, the involvement of « resilience facilitators » and the production factors, such
as access to land, investments, and water management, contribute to income
disparities among farmers.